Magistrature : tous face au défi de la renaissance

L’image que la mémoire collective continue de garder de la magistrature congolaise est celle d’une « institution » qui s’est dangereusement éloignée de sa mission de régulation de la vie en
société, à travers la distribution du bon droit. On  a beau  recruter de nouveaux magistrats et tenter de les mettre dans des conditions maximales de service, les antivaleurs dénoncées en son temps par un ancien ministre de la Justice, résumées par les « 3 V », à savoir «Villa », « Voiture » et « Veste » ont plus que jamais la peau dure. A une certaine époque, certains compatriotes s’étaient même plaints de la montée en force de la « République des magistrats », au détriment de l’Etat de droit.

        Par conséquent, le défi de la renaissance de la magistrature, que le Chef de l’Etat, Félix Antoine Tshisekedi, s’est lancé à lui-même d’abord et à l’ensemble de la Nation ensuite va exiger une prise de conscience collective du mal profond qui ronge l’appareil judiciaire congolais. S’il est vrai qu’avant de demander au jeune magistrat de dire correctement le droit, il faut le mettre dans des dispositions morales, professionnelles et sociales de nature à le mettre à l’abri
des tentations, il est tout autant vrai que sans une conscience professionnelle aiguisée, le sens du sacrifice, le souci du respect de l’éthique et de la déontologie du métier, le pays risque d’aller de nouveau au-devant de l’échec, comme c’était le cas avec la couvée de 2011, sous le mandat de l’ancien Chef de l’Etat, Joseph Kabila.
        Alors que l’on s’attendait à ce que les 1000 magistrats recrutés à l’époque sur concours fassent la différence avec leurs aînés dans le traitement des dossiers et les prononcés des décisions judiciaires, rien n’a changé. Parmi les causes ayant conduit à la descente aux
enfers, il y avait d’une part la forte présence, parmi les « recrues », des « ngulu » n’ayant pris part ni au concours écrit, ni à l’oral mais admis dans le corps des magistrats grâce aux parrainages politiques, claniques, tribunaux et familiaux. Plusieurs médias qui avaient dénoncé ces recrutements clientélistes avaient subi des menaces de toutes sortes de la part des parrains de ces « ngulu ».
        On avait assisté, par la suite, à l’abandon de jeunes magistrats envoyés en provinces à leur sort. Sans bureaux pour travailler, sans salaires, sans logement et sans mobilité dans leurs nouveaux lieux d’affectation, beaucoup avaient préféré regagner Kinshasa, pour encombrer les locaux déjà surpeuplés des cours et tribunaux de la capitale, pour se lancer, comme leurs ainés, dans la course à l’enrichissement  sans cause, au détriment des justiciables.
        Le défi de la renaissance de la magistrature peut-être relevé si les jeunes magistrats, civils et militaires, ont la garantie de ne pas être réduits à la mendicité d’une part et, d’autre part, si les
instances de contrôle et de sanction des dérapages fonctionnent correctement. D’ici peu, les justiciables vont s’ériger en gardiens du temps pour vérifier si un embryon de l’Etat de droit va germer à partir du champ de la justice.

Kimp

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