Il était une fois

Kinshasa, ce jour du 21 janvier 2018 Ceux qui nous quittent aujourd’hui ont un nom. Ils ont un âge. Ils ont un visage :

  1. Thérèse Kapangala
  2. Hussein Ngandu Kisene
  3. Jackson Kabadiatshi
  4. Benjamin Muigilau
  5. Matthieu Fuamba
  6. Serge Kikunda
    Tous, des jeunes êtres que des armes en folie ont arraché à la vie. Ils ne rêvaient que d’une seule chose : vivre heureux sur cette terre de nos ancêtres. Ils n’ont jamais cru, un seul instant, qu’ils devaient donner leurs vies pour que les dirigeants de ce pays comprennent qu’ils n’avaient simplement soif que de liberté et de bonheur.
    Ces morts que nous honorons aujourd’hui suscitent de multiples interrogations parmi lesquelles je retiendrai celles du corps innocent de Thérèse. Là où elle se trouve, à cet instant, Thérèse nous interroge tous, en commençant sans doute par son père, officier de police, membre d’un Corps dont le rôle est de protéger la vie des citoyens :
    « Oui, papa, aujourd’hui la police a tué sa propre fille, elle qui a toujours tiré
    sur les enfants des autres ;

    Oui papa, tous les officiers comme toi, dans tous nos camps militaires et de Police, ne savent plus à qui adresser leurs condoléances.
    Mais, au-delà de ces instants de douleur, ma mort cherche quelques réponses à mes interrogations:
  • Qui, dans vos services, donne des armes de guerre pour encadrer des marches pacifiques ? Dis-moi qui, papa ?
  • Qui, dans vos services, distribuent, comme des petits pains, ces munitions qui tuent ? Dis-moi qui, papa ?
  • Qui, dans vos services, donne les ordres de tuer, après avoir pourtant donné des assurances que les bavures d’hier ne se reproduiraient plus ? Oui, papa, qui ?
  • Qui vous vend ces armes et munitions car, à ce que je sache, notre pays n’en produit pas. Peux-tu répondre papa, qui ?
  • Enfin, pourquoi obéissez-vous à des ordres injustes ? Pourquoi, papa ?
    Je suis morte, mais je ne te quitterai que lorsque tu auras répondu à mes interrogations. C’est alors que je pourrai les partager avec mes compagnons d’infortune. C’est alors que nous cesserons de hanter les esprits de tous nos pères, tes collègues de la Police, de l’Armée et des Services de Renseignements. Car, au moment où je te parle, je suis toujours là, ma tête sur tes jambes jusqu’à ce que tu me déposes, endormie, dans mon lit. Tu resteras toujours mon père adoré Je t’aime. »

Thierry Nlandu Mayamba
Membre du Comité Laïc de Coordination

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