Au regard de la déclaration de son bureau : et si Blinken n’était passé par Kinshasa que pour des minerais !

N’en seront surpris que ceux qui veulent l’être. Oui, la fréquence avec laquelle les termes «investisseurs américains, contrats miniers, minéraux, métaux etc.» reviennent dans la position officielle des États-Unis par rapport aux relations avec la République Démocratique du Congo est un indice sérieux de conviction. Dans sa fiche descriptive ayant pour titre «Les relations entre les États-Unis et la
République Démocratique du Congo», le Département d’État y fait allusion à six reprises, en des termes tantôt clairs, tantôt nuancés :
– « commerce et investissement bilatéraux » ;
– « attraction du commerce et des investissements américains » ;
– « sécurisation des chaînes d’approvisionnement en minerais critiques
nécessaires à la transition mondiale vers des formes d’énergie plus
propres et à l’atténuation de la criminalité transnationale organisée
» ;
– « résolution sur la gestion des minéraux et des métaux lors de
l’Assemblée des Nations Unies pour l’environnement de février 2022 » ;
– « félicitations de la décision du gouvernement de la RDC de revoir
les contrats miniers et une plus grande responsabilisation dans le
secteur » et
– « respect des normes environnementales, sociales et de gouvernance pour le secteur minier. Les États-Unis fournissent plus de 30 millions de dollars d’aide pour aider la RDC à promouvoir des pratiques minières responsables et durables ».
Avec un tel accent sur un secteur précis et l’obsession des Etats-Unis vis-à-vis du Contrat sino-congolais, le pragmatisme veut que la visite d’Anthony Blinken soit associée à la seule quête des minerais du Congo.
Comparativement, les notions traditionnelles de la politique étrangère américaine apparaissent moins : Droits de l’homme (5), Environnement/Changement climatique (4), Respect de la Démocratie (1),
Corruption (1), Promotion de la paix dans l’est de la RDC (1), Elections (1).

NOUVELLE STRATÉGIE POUR L’AFRIQUE ?

Puis une communication paradoxale ! A l’étape de Kigali, Anthony Blinken a rapporté à Paul Kagame la position ferme du Président Félix Tshisekedi au sujet de l’agression rwandaise et du M23, sommé de se retirer de Bunagana sans condition. Mais dans sa déclaration de fin de séjour, l’officiel américain a enjoint la RDC et le Rwanda de ne pas soutenir les groupes armés (allusion faite aux FDLR et au M23), comme pour accuser la RDC. La paix à l’Est n’intéresse pas les Etats-Unis,
plutôt les minerais. D’où par « Nouvelle Stratégie pour l’Afrique » (NSA, comme par hasard), il faut comprendre « Minerais Stratégiques de l’Afrique » dont le cuivre, le cobalt, le coltan, l’or et le lithium, dont les gisements vont du Grand Katanga à Isiro, en passant par le Grand Kivu, pour ce qui est de la RDC pourtant engluée dans des guerres pour lesquelles le Dr Denis Mukwege déclarait devant le couple royal belge en visite à Bukavu qu’un coup de fil suffirait pour permettre aux Congolais de recouvrer la paix et de jouir de leurs ressources naturelles. Tout juste un coup de fil…
Comment, du reste, douter de l’intérêt porté par Anthony Blinken lorsque le sous-secrétaire adjoint José Fernandez a reçu des assurances à Kinshasa sur « plus de 380 titres miniers irréguliers dissouts et 300 permis (…) revenus dans le domaine de l’Etat », initiative placée, tenez bien, dans le cadre de la coopération
Etats-Unis/RDC ?
D’ailleurs, dans la foulée, il ressort que « Pour les États-Unis, la RDC doit exclure de la chaîne de production, toutes les personnes physiques ou morales mises à l’index par Washington pour des compromissions dans des activités minières en RDC ».
Pendant la visite-éclair, Washington a rappelé le Mémorandum d’entente signé en mars dernier avec Kinshasa pour « la formation des inspecteurs miniers, la politique de négociation des contrats miniers, la protection de l’environnement dans les zones d’activités minières, la lutte contre la fraude minière»… Les Etats-Unis veulent tenir le gouvernail pour décider de qui doit exploiter les minerais au
Congo-Kinshasa.

Erick Nsiala/Journaliste indépendant

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