La «guerre» du carburant à Kinshasa

Après l’incendie d’une baleinière à Maluku avec une cargaison de produits pétroliers ayant causé plusieurs morts parmi les voyageurs et celui du quartier Debonhomme avec un dépôt présumé clandestin de fûts et citernes de carburants, le commun de Kinois était loin d’imaginer l’existence d’un partenariat entre l’Etat congolais et les « Kadhafi », ces vendeurs d’essence, de gazoil et autre pétrole au noir. D’où la surprise générale de les voir faire un sit in, hier lundi 28 mars 2022, devant le siège du ministère des Hydrocarbures. D’aucuns ont cru, sur le moment, qu’il s’agissait d’une saute d’humeur de la part d’individus qui exerçaient leurs activités de stockage et de vente des produits pétroliers dans l’illégalité la plus parfaite.

            Renseignements pris, il appert qu’il existe de grossistes parmi les « Kadhafi » ou ceux présentés comme tels et qu’ils appartiennent à une catégorie d’opérateurs économiques connus des pouvoirs publics. En effet, l’exercice du commerce des produits pétroliers par ces particuliers est régi par des autorisations préalables à obtenir soit du ministère des Hydrocarbures, soit de ses divisions provinciales. Il est souligné clairement que ces documents les autorisent à transporter, stocker et vendre les produits pétroliers sur toute l’étendue de la République, sous réserve des dispositions légales, notamment l’interdiction de transporter en même temps des produits pétroliers et des personnes dans les mêmes engins (camions, bateaux, baleinières).

            En sus des autorisations d’exercer le commerce des produits pétroliers, les « Kadhafi » grossistes payent annuellement des taxes et impôts divers à l’Etat, au même titre que d’autres opérateurs économiques. On comprend dès lors leur réaction épidermique face à ce qu’ils considèrent comme une rupture abusive, par l’Etat congolais, du partenariat qui les lie depuis plusieurs années. On peut s’étonner, quelque part, de l’attitude équivoque du gouvernement qui s’est précipité, au vu de l’émotion suscitée par les dégâts matériels et humains de l’incendie du quartier Debonhomme, à fermer les dépôts privés des produits pétroliers, qualifiés de clandestins, et chasser les « Kadhafi » qui vendent au détail, des voies publiques. En fait, on se trouve devant une situation où des détenteurs des documents de commerce encore valables pour toute l’année 2022 sont interdits de transporter, stocker et vendre des produits pétroliers.

Un assainissement du secteur s’impose

            Les observateurs pensent qu’au regard de ce qui s’est produit à Maluku et au quartier Denbonhomme, le gouvernement ou, mieux, le ministre ayant les Hydrocarbures dans ses attributions devrait assainir le secteur du transport, du stockage et de la vente des produits pétroliers, laissé jusqu’alors à la portée de quiconque était en mesure de remplir les conditions exigées à ce sujet. Les ministères tels que l’Economie nationale et l’Environnement, bénéficiaires de la « manne pétrolière » sous la forme de taxes diverses, devaient aussi être interpellés. Par conséquent, avant de déclarer caduques les « autorisations » déjà tombées dans le domaine public, le bon sens commande des concertations entre les officiels et leurs partenaires sociaux poussés brutalement vers la faillite.

            Au nom de l’amélioration du climat des affaires, les « Kadhafi » en règle avec la législation en vigueur méritent d’être dédommagés au prorata du préjudice leur causé par l’arrêt brutal de leurs activités commerciales. Il est fort dommage que ceux qui devaient agir en amont pour éviter des tragédies du genre de ceux de Maluku et Debonhomme aient privilégié leurs intérêts personnels au détriment de la sécurité de la multitude.

Kimp

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