Des espions rwandais parmi nous depuis Mobutu

Lors d’un briefing diffusé sur la Radio Télévision Nationale Congolaise le mardi 27 octobre 2022, les porte-paroles des FARDC (Forces Armées de la République Démocratique du Congo), le général Sylvain Ekenge, et de la Police Nationale Congolaise, le colonel Pierrot Mwanamputu, un réseau d’espions d’origine rwandaise et congolaise a été présenté aux médias, en présence du vice-ministre de l’Intérieur. Il s’agit principalement de Juvénal Nshimiyimana Biseruka ( 58 ans), Murokore Mushabe Moses (33 ans), Nganji Nsengiyumwa (42 ans), Colonel Mugisha Ruyumbu Santos (42 ans).

Deux de ces espions se faisaient passer pour des membres de l’ONG « AHDO » (African Health Development Organization). C’est sous cette étiquette qu’ils avaient acquis une concession dans le périmètre de l’aéroport international de N’Djili, à Kinshasa, dans le dessein bien arrêté d’attenter à la vie du Chef de l’Etat, sur le modèle de celui de l’avion de feu Juvénal Habyarimana en 1994.
L’échantillon mis aux arrêts pourrait conduire les services spéciaux de la RDC à démasquer d’autres membres du réseau actuellement en fuite.

Le ver dans le fruit depuis Mobutu
Nombre d’observateurs ne sont nullement surpris d’apprendre que des
sujets rwandais, en complicité avec des Congolais, étaient dans les préparatifs d’un complot visant l’élimination physique du Chef de l’Etat, à Kinshasa même. Car, un petit coup d’œil dans le rétroviseur de l’histoire nationale montre que le pays est infiltré depuis plusieurs décennies et plus particulièrement sous le règne du second Président de la République, feu Joseph Désiré Mobutu Sese Seko
(1965-1997), qui avait eu, pendant une dizaine d’années, comme Directeur de cabinet, Barthélemy Bisengimana.
Point n’est besoin de rappeler que ce dernier, dans sa position de fidèle « conseiller » de Mobutu, avait eu le temps de positionner ses compatriotes rwandais dans les centres de décisions de la République (Sécurité, Armée, Police, Gouvernement, Parlement, Bureau Politique du MPR, Comité Central du MPR, etc). Une des plus grosses bourdes commises par Mobutu, à l’instigation de ses souffleurs rwandais présents dans les institutions de la République, était l’adoption, par le Comité Central du MPR (Mouvement Populaire de la Révolution), d’une
Résolution coulée en Ordonnance présidentielle, laquelle accordait, de manière collective, la nationalité zaïroise à des milliers de membres de la communauté rwandaise.
Ainsi donc, des hommes, des femmes et des enfants notoirement connus
comme Rwandais, particulièrement à l’Est du pays, étaient devenus, du jour au lendemain, des « citoyens zaïrois », avec toutes les conséquences que l’on connait aujourd’hui. AFDL : véritable cheval de Troie
Alors que sous Mobutu, les Rwandais faisaient profil bal pour ne pas s’attirer le courroux des « Zaïrois authentiques », tout a changé sous le régime de l’AFDL (Alliance des Forces Démocratiques pour la Libération du Congo), pilotée par Laurent Désiré Kabila, laquelle avait fait partir Mobutu en mai 1997, après avoir conquis militairement l’ensemble du pays en l’espace de 7 mois, grâce au
soutien de ses alliés rwandais, ougandais, burundais, érythréens et angolais.
Cerise sur le gâteau, Mzee Kabila s’était même permis de placer le colonel rwandais James Kabarebe comme chef d’état-major général des FARDC et un autre Rwandais, Bizima Karaha, comme ministre des Affaires Etrangères. Ainsi donc, de 1997 à 1998, tout le dispositif congolais de défense et des renseignements était totalement sous le contrôle des Rwandais, qui avaient du reste eu tout le temps de compiler des cartes militaires, des archives des renseignements civils comme militaires,
etc.

1998- 2003 : le règne du non-Etat
Après la rupture entre Laurent Désiré Kabila et ses alliés rwandais et ougandais en août 1998, ceux-ci s’étaient vengé en suscitant trois grands mouvements rebelles, à savoir le RCD (Rassemblement Congolais pour la Démocratie), estampillé pro-rwandais, le MLC (Mouvement de Libération du Congolais) et le RCD-K-ML (Rassemblement Congolais pour la Démocratie – Kisangani – Mouvement de Libération), placés tous deux sous le label de Kampala. De nombreux cadres politiques et militaires, tant ougandais que rwandais, ont infiltré ces rébellions présumées congolaises et créé des Républiquettes dans les territoires sous leur contrôle, notamment une portion de l’Equateur et de la Province Orientale pour le MLC, une partie du Nord-Kivu pour le RCD-K-ML, une
partie du Nord-Kivu, l’ensemble des provinces du Sud-Kivu et du Maniema, une partie des provinces du Katanga, du Kasaï Oriental, du Kasaï Occidental et de la Province Orientale pour le RCD/Goma.
Plus de la moitié du pays a échappé, pendant 5 ans, au contrôle du gouvernement central, qui n’avait plus la mainmise que sur le Kongo Central, Kinshasa, Bandundu, une partie des provinces de l’Equateur, de deux Kasaï et du Katanga.
Chacun peut imaginer les dégâts sur le plan de la sécurité, de la défense et de l’économie. Comme si cela ne suffisait pas, le Dialogue Intercongolais, organisé en 2002 à Sun City, en Afrique du Sud, avait accouché d’un monstre baptisé « 1+4 » (un Président et 4 vice-présidents). Des étrangers, surtout des Rwandais, avaient ainsi eu le loisir de se positionner non seulement dans les institutions de la transition entre 2003 et 2006, mais surtout dans l’armée et les services de sécurité, sous la pieuse formule du « partage équitable et équilibré » entre les « Composantes » Gouvernement, RCD/Goma, MLC, Opposition non armée.
Au jour d’aujourd’hui, bien malin serait celui qui oserait « nettoyer les écuries » pour en extraire les Congolais douteux et suspects, dans lesquels se cachent des ennemis non déclarés de la République.
Kimp

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